Le 16 décembre 2024, au cours d’une journée tumultueuse sur la Colline du Parlement, le gouvernement fédéral a publié son Énoncé économique de l’automne de 2024, qui a été fortement retardé. Plus tôt dans la journée, Chrystia Freeland a démissionné de son poste de vice-première ministre et de ministre des Finances. En son absence, l’Énoncé économique de l’automne de 2024 a été déposé, mais n’a pas été présenté ni débattu en Chambre, alors que le député Dominic LeBlanc était assermenté comme nouveau ministre des Finances du Canada.
Déposé à l’avant-dernier jour de séance du Parlement de 2024, l’Énoncé économique de l’automne de 2024 fournit une mise à jour très attendue sur l’état de l’économie canadienne. Il reflète l’accent mis sur le coût de la vie et l’abordabilité du logement.
Faits saillants:
- Déficit de 61,9 milliards de dollars
- Les changements apportés au taux d’inclusion des gains en capital vont se poursuivre – aucune mise à jour
- La « Remise pour les travailleurs canadiens » de 250 $ n’a pas été mentionnée
- Aucun changement du taux d’imposition du revenu des particuliers ou des sociétés
Le point sur l’économie canadienne
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 a révélé un déficit de 61,9 milliards de dollars pour 2023-2024, soit un excédent de 21,9 milliards de dollars par rapport au déficit de 40 milliards de dollars prévu dans le budget de 2024. Il prévoit également un déficit de 48,3 milliards de dollars pour 2024-2025, soit une augmentation de 8,5 milliards de dollars par rapport aux projections du budget de 2024 d’il y a huit mois. Malgré l’ampleur des ratés en matière de déficit, les projections de l’Énoncé économique de l’automne de 2024 semblent respecter deux autres objectifs budgétaires annoncés précédemment :
- la réduction du ratio de la dette au PIB d’une année à l’autre, qui est passé de 41,9 % en 2024-2025 à 38,6 % en 2029-2030;
- le maintien d’un ratio du déficit au PIB en baisse et le maintien des déficits en deçà de 1 % du PIB en 2026-2027 et dans les années à venir.
L’inflation est demeurée dans la fourchette cible de 1 à 3 % de la Banque du Canada pour 2024. L’inflation était de 2 % en octobre.
Mesures concernant le coût de la vie
Congé de taxe sur les « produits essentiels »
La Loi concernant un congé fiscal pour l’ensemble des Canadiens, dont on a beaucoup parlé, a été soulignée en bonne place sous la rubrique « Réduire le coût de la vie au quotidien » de l’Énoncé économique de l’automne de 2024. Cette loi a instauré un congé de deux mois pour la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (TPS/TVH) sur certains « produits essentiels », notamment « l’épicerie, les repas au restaurant, certaines boissons, les collations, les vêtements pour enfants et certains articles cadeaux ».
Le gouvernement fédéral estime que la période de deux mois allant du 14 décembre 2024 au 15 février 2025 offrira aux Canadiens un allégement fiscal estimé à 1,6 milliard de dollars.
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 ne fait aucune référence à ce que l’on appelait la « Remise pour les travailleurs canadiens », qui devait être un chèque de 250 $ aux « travailleurs canadiens » qui respectaient certaines limites de revenu. À ce stade, la remise, qui a été un point majeur de débat au cours des dernières semaines, semble avoir été largement abandonnée.
Supplément rural de la Remise canadienne sur le carbone
Les Canadiens qui vivent dans les régions rurales ont droit à un supplément de 20 % sur la Remise canadienne sur le carbone. Ce « supplément » équivaut à 360 $ de plus pour une famille de quatre personnes vivant en milieu rural. Si l’on tient compte de ce supplément, une famille rurale de quatre personnes pourrait recevoir une remise totale de 2 160 $ (comparativement à une remise totale de 1 800 $ pour une famille urbaine comparable de quatre personnes).
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce l’intention du gouvernement d’augmenter le nombre de Canadiens admissibles au « supplément » rural à compter d’avril 2025. Le gouvernement fédéral s’attend à ce que 1,6 million de Canadiens de plus soient admissibles au « supplément » en vertu des critères d’admissibilité élargis.
Mesures d’abordabilité du logement
Ajouter des logements accessoires aux maisons unifamiliales
En s’appuyant sur les mesures annoncées précédemment dans le budget de 2024 pour appuyer les logements accessoires, le gouvernement a reconfirmé son intention de densifier les logements par la construction de logements accessoires et de maisons sur ruelle.
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 propose de doubler la limite de prêt du « programme canadien de prêt pour la construction d’un logement accessoire », la faisant passer de 40 000 $ à 80 000 $. Le programme vise à offrir un financement à faible coût pour encourager la construction de logements accessoires en offrant un prêt de 15 ans à un taux d’intérêt bas de 2 %.
Le programme, qui sera administré par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), devrait être lancé au début de 2025.
Accélérer le financement pour construire des logements plus rapidement
Dans le but de régler la crise du logement, le gouvernement a élaboré et financé le « Programme de prêts pour la construction d’appartements » de 30 milliards de dollars depuis la fin de 2023. Citant la « forte demande » à l’égard de ce programme, l’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce des plans visant à accélérer un financement à faible coût de 2 milliards de dollars afin que les constructeurs puissent accéder immédiatement à du financement pour les aider à construire des logements plus rapidement.
Éliminer la simulation de crise lors du renouvellement hypothécaire
L’Énoncé économique de l’automne de 2023 a supprimé la « simulation de crise » pour les prêts hypothécaires assurés au moment du renouvellement. Ces mesures visaient à permettre aux Canadiens d’obtenir de meilleurs taux dans un marché hypothécaire plus concurrentiel. L’Énoncé économique de l’automne de 2024 souligne l’élimination des exigences de « simulation de crise » au moment du renouvellement des prêts hypothécaires non assurés lorsque le titulaire passe d’un prêteur sous réglementation fédérale à un autre. L’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce également son intention de lancer d’autres consultations sur les règles relatives aux prêts hypothécaires assurés.
Examiner les prêts hypothécaires à taux fixe à long terme
Historiquement, les prêteurs hypothécaires canadiens ont le plus souvent offert des prêts de cinq ans ou moins. Dans d’autres pays comme les États-Unis, les prêts hypothécaires à taux fixe sur 30 ans sont plus courants, mais offrent une souplesse moindre que les prêts hypothécaires canadiens moyens.
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce son intérêt pour le lancement de consultations sur le développement du marché des hypothèques à long terme au Canada.
Mesures fiscales
Production automatique de déclarations de revenus
Le Canada a un régime d’autodéclaration fiscale en vertu duquel les Canadiens doivent produire une déclaration de revenus pour déclarer leurs revenus. Le défaut de produire une déclaration peut entraîner des intérêts et des pénalités en cas d’impôt impayé, mais aussi la perte d’avantages comme le crédit pour TPS et l’Allocation canadienne pour enfants.
Dans le prolongement d’un projet présenté pour la première fois dans le budget de 2023, l’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce l’élaboration d’une loi permettant la production automatique des déclarations de revenus de certains Canadiens à faible revenu, à compter de l’année d’imposition 2025. Des projets exploratoires visant à étendre la production automatique des déclarations de revenus aux particuliers de la classe moyenne dont la situation fiscale est simple et à accroître l’accès à un logiciel de production en ligne gratuit ont également été mentionnés.
Mesures fiscales pour les particuliers
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce l’intention du gouvernement d’adopter plusieurs mesures relatives à l’impôt sur le revenu des particuliers, notamment :
- un crédit d’impôt remboursable pour les préposées et préposés aux services de soutien à la personne (aucun détail n’a été fourni, si ce n’est qu’il pourrait s’inspirer du crédit d’impôt pour les pompiers volontaires);
- une exclusion du calcul de l’impôt de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées, qui vient d’être lancée, de sorte que la réception de la prestation ne réduise pas l’accès à d’autres prestations fondées sur le revenu. Les commentaires encouragent également les provinces à veiller à ce que la réception de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées n’ait pas d’incidence sur l’accès d’une personne aux mesures de soutien provinciales et à noter que le gouvernement examine toujours les commentaires reçus pendant la consultation sur le Règlement sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées.
Prolongation de l’Incitatif à l’investissement accéléré
Afin d’attirer des investissements de capitaux au Canada et de maintenir notre compétitivité par rapport à d’autres pays, l’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce le rétablissement de l’Incitatif à l’investissement accéléré. L’Incitatif à l’investissement accéléré permet aux sociétés d’amortir plus rapidement leurs investissements en capital aux fins de l’impôt. Ces mesures visent à réduire l’impôt à payer d’une société et à améliorer ses flux de trésorerie.
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 annonce que ces radiations accélérées se poursuivront pour les actifs admissibles acquis par la société le 1er janvier 2025 ou après cette date et qui seront disponibles pour utilisation avant 2030. Il est proposé d’éliminer progressivement l’Incitatif à l’investissement accéléré sur une période de quatre ans entre 2030 et 2033.
Recherche scientifique et développement expérimental (RS&DE)
L’incitation fiscale pour la RS&DE est conçue pour encourager l’innovation dans les entreprises canadiennes. L’Énoncé économique de l’automne de 2024 propose les changements suivants au programme :
- Une série d’améliorations : rehausser la limite de dépense pour accéder au crédit d’impôt à l’investissement remboursable (CII) bonifié (35 %) de 3 millions de dollars à 4,5 millions de dollars, augmenter les limites de capital imposable pour la réduction progressive de l’admissibilité aux CII (augmentation de 10 à 50 millions de dollars à 15 à 75 millions de dollars), et accès au CII majoré pour les sociétés publiques canadiennes. Ces améliorations entreront en vigueur pour les années d’imposition commençant le ou après le 16 décembre 2024.
- Il est proposé que les dépenses en capital pour les biens acquis le 16 décembre 2024 ou après cette date soient admissibles à la fois à une déduction du revenu et à un CII.
- Plus de précisions sur l’administration du programme de RS&DE et des mises à jour sur les dépenses admissibles seront annoncées dans le budget de 2025.
- Un régime privilégié de brevets permettant des taux d’imposition plus bas sur certaines propriétés intellectuelles.
Permettre le report par roulement des gains en capital découlant d’investissements dans des entreprises
Afin d’encourager le réinvestissement dans les petites entreprises, les investisseurs qui vendent des actions admissibles d’une petite entreprise peuvent reporter le gain en capital sur la vente si le produit est utilisé pour réinvestir dans des actions admissibles d’une autre petite entreprise. Les actions de remplacement doivent être achetées l’année de la vente ou dans les 120 jours suivant cette année.
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 propose d’allonger la période de remplacement permise pour inclure l’année complète suivant l’année de vente. En outre, les critères d’admissibilité pour les actions seraient élargis pour permettre à la fois les actions privilégiées et les actions ordinaires d’être admissibles (actuellement, seules les actions ordinaires sont admissibles) et pour augmenter la limite d’actif pour la société exploitant une petite entreprise à 100 millions de dollars (au lieu de 50 millions de dollars). Ces modifications s’appliqueraient aux dispositions admissibles effectuées à compter du 1er janvier 2025.
Rapports des organismes sans but lucratif (OSBL)
L’Énoncé économique de 2024 propose plusieurs mesures pour accroître les déclarations des OSBL et pour améliorer la transparence dans le secteur, à partir des années d'imposition 2026. À l’heure actuelle, les OSBL qui ont un revenu passif de plus de 10 000 $ ou des actifs de plus de 200 000 $ ou qui ont déjà été tenus de produire une déclaration doivent produire une déclaration de renseignements annuelle. En vertu de ces propositions, les OSBL dont les revenus bruts dépassent 50 000 $ seraient également tenus de produire une déclaration de renseignements. L’Énoncé économique de l’automne de 2024 propose également un nouveau formulaire abrégé obligatoire pour les OSBL qui se situent en deçà du seuil de déclaration afin de présenter des renseignements de base sur l’organisme.
Mesures déjà annoncées
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 a réaffirmé l’intention du gouvernement d’aller de l’avant avec de nombreuses mesures fiscales annoncées précédemment. Parmi celles-ci, mentionnons les augmentations proposées du taux d’inclusion des gains en capital et de l’exonération cumulative des gains en capital ainsi que le nouvel incitatif aux entrepreneurs canadiens, qui ont toutes été annoncées pour la première fois dans le budget de 2024, avec plus de détails et des changements publiés dans les mois qui ont suivi. Il n’y avait aucune indication dans l’Énoncé économique de l’automne de 2024 des modifications prévues des mesures proposées.
On a également réaffirmé les modifications proposées aux nouvelles règles de déclaration des fiducies qui pourraient, en particulier, offrir un certain allégement pour les ententes de type « simple fiducie » ainsi que les modifications supplémentaires à l’impôt minimum de remplacement (bien que la plupart de ces mesures aient été adoptées en juin et soient entrées en vigueur le 1er janvier 2024).